Fiche d'information scientifique : La résistance aux antimicrobiens
Un problème qui prend de l'ampleur
La résistance aux antimicrobiens (RAM) est maintenant considérée comme une menace croissante pour la santé publique au Canada et partout dans le monde. La RAM survient lorsque des microbes (par exemple bactéries, virus, champignons et parasites) évoluent et, par le fait même, réduisent ou éliminent l'efficacité des antimicrobiens utilisés pour traiter les infections en éliminant la croissance microbienne ou en la ralentissant.
L'importance des antimicrobiens
Les antimicrobiens sont utilisés pour traiter un large éventail d'infections. Ils sont aussi essentiels pour certains traitements médicaux importants. Par exemple, les antimicrobiens sont utilisés pour prévenir ou combattre les infections lors d'une chimiothérapie et après une transplantation d'organe, lorsque les défenses immunitaires naturelles de l'organisme sont affaiblies. Sans antimicrobiens efficaces, le risque d'infection augmenterait, ce qui accroîtrait la durée de la maladie et le risque de décès.
Les antimicrobiens sont également utilisés pour combattre, prévenir et traiter les maladies chez les animaux d'élevage, améliorer l'efficacité alimentaire, favoriser la croissance et préserver la santé et le bien-être des animaux.
Usage abusif
Les antimicrobiens sont parfois trop ou mal utilisés en médecine humaine et animale, ainsi que dans l'industrie agroalimentaire et même dans les produits de nettoyage. Les humains et les animaux sont souvent exposés accidentellement (par exemple par une contamination de l'environnement ou des aliments insalubres) aux antimicrobiens ou aux microbes devenus résistants aux antimicrobiens.
Comment la RAM se développe-t-elle?
Les microbes évoluent naturellement en réaction aux changements dans leur environnement, notamment par le contact avec les antimicrobiens. Plus nous utilisons les antimicrobiens, plus la résistance se développe rapidement. Lorsque les antimicrobiens sont trop ou mal utilisés, les microbes résistants survivent au traitement et se multiplient. Au fil du temps, la présence d'un nombre suffisant de ces microbes résistants peut contribuer à l'apparition de nouvelles souches résistantes aux antimicrobiens qu'il est impossible de combattre à l'aide des traitements disponibles.
Par exemple, comme toute autre bactérie, les bactéries résistantes peuvent se propager par l'entremise de la chaîne alimentaire dans de la viande crue, un produit contaminé par l'eau ou le sol, un aliment préparé contaminé par des surfaces, ou dans l'environnement par des déchets animaux et humains. Elles peuvent également se propager en raison d'une prévention et d'un contrôle inadéquats des infections dans les milieux de soins de santé ou par contact entre personnes.

Description de l'image – La résistance aux antimicrobiens
Lorsqu'il y a un nombre élevé de bactéries, quelques-unes d'entre elles sont résistantes aux antibiotiques.
Les antibiotiques tuent les mauvaises bactéries qui causent la maladie, de même que les bonnes bactéries qui sont présentes naturellement dans l'organisme et qui protègent ce dernier contre les infections.
Les bactéries résistantes peuvent désormais se développer et se multiplier librement.
Certaines bactéries peuvent même transférer leur résistance à d'autres bactéries, ce qui cause plus de problèmes.
Une menace mondiale
Les organisations de santé publique dans la plupart des pays considèrent la RAM comme une menace mondiale. Les microorganismes résistants aux antimicrobiens (MRA) ne restent pas confinés au lieu ou à l'environnement où ils se forment. Les voyages, le tourisme médical, la production d'aliments à l'échelle internationale et l'acheminement de nourriture ou d'animaux d'un pays à l'autre favorisent la propagation des MRA partout dans le monde.
La RAM existe maintenant dans tous les pays du monde. Dans certains cas, des souches de la bactérie E. coli analysées présentent une résistance allant de 5 à 80 %. La RAM représente l'une des plus grandes menaces actuelles pour la santé humaine dans le monde.
La RAM et la médecine vétérinaire
De plus en plus de données indiquent que l'utilisation d'antimicrobiens en médecine vétérinaire et dans la production animale contribue à l'apparition de bactéries résistantes aux antimicrobiens chez les humains. Des antimicrobiens sont administrés aux poulets, aux porcs, aux bovins et aux autres animaux destinés à l'alimentation afin de traiter et de prévenir les maladies. Cependant, puisque les MRA se transmettent des animaux aux humains, il est nécessaire d'évaluer la façon dont la RAM chez les animaux destinés à l'alimentation met la santé humaine à risque.
La production alimentaire et la RAM au Canada
Le Canada est un important producteur d'animaux destinés à l'alimentation sur les marchés national et international. Le pays compte 19 fois plus d'animaux que d'humains, surtout de la volaille.
Selon les données publiées par le Programme intégré canadien de surveillance de la résistance aux antimicrobiens (PICRA), en 2015, environ 1,8 million de kilogrammes d'antimicrobiens ont été distribués ou vendus pour utilisation chez les humains, les animaux et dans les cultures au Canada. On comptait approximativement 1,6 fois plus d'antimicrobiens distribués pour utilisation chez les animaux que chez les humains. Parmi ces antimicrobiens :
- 82 % visaient les animaux destinés à l'alimentation
- 17 % étaient pour les humains
- moins de 1 % étaient destinés aux animaux de compagnie
- moins de 1 % étaient consacrés aux cultures
La plupart des antimicrobiens administrés aux animaux étaient les mêmes que ceux utilisés chez les humains. Par conséquent, les microbes développent une résistance à certains antimicrobiens, ce qui augmente le risque pour la santé humaine.
Comment le gouvernement du Canada combat-il la RAM?
Le gouvernement du Canada surveille la RAM d'E. coli, de Campylobacter et de Salmonella chez le poulet, le porc et le bœuf. Il surveille également la RAM de Campylobacter et de Salmonella chez l'humain. Cette approche permet d'évaluer la façon dont les MRA se transmettent des animaux aux humains.
L'Agence canadienne d'inspection des aliments utilise des technologies de pointe comme le séquençage génomique complet pour analyser la résistance aux antimicrobiens des bactéries d'origine alimentaire. Cette technologie permet aux scientifiques d'examiner la structure entière du génome de bactéries comme E. coli ou Listeria. Ils peuvent ainsi constater à quel point certaines souches sont résistantes, de façon à pouvoir établir des plans de correction ou de prévention avec les producteurs d'aliments.
La surveillance de la RAM au Canada
Le Système canadien de surveillance de la résistance aux antimicrobiens (SCSRA) de l'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) est la source principale des rapports sur la résistance aux antimicrobiens et l'utilisation des antimicrobiens.
Il utilise des données des systèmes de surveillance et services de référence de laboratoire de l'ASPC qui suivent les microorganismes résistants au Canada.
Le SCSRA collabore avec d'autres ministères gouvernementaux, des partenaires provinciaux et territoriaux, des fournisseurs de services de santé publique et des universités pour surveiller les tendances et les conséquences, ainsi que combler les lacunes en matière de surveillance. Voici les objectifs du SCSRA et des programmes qui le composent :
- Fournir aux provinces, aux territoires et aux intervenants des données et des analyses fiables et en temps opportun, en intégrant des documents de tous les programmes de l'ASPC ainsi que la surveillance de la résistance aux antimicrobiens et de leur utilisation chez les humains, chez les animaux et dans les cultures. Cela contribue à éclairer la prise de mesures en matière de santé publique, par exemple, la prévention et le contrôle des infections, la recherche et l'innovation
- Orienter les activités de surveillance des infections résistantes les plus dangereuses pour la santé des Canadiens
- Fournir aux Canadiens des renseignements fiables et en temps opportun sur les tendances de la résistance aux antimicrobiens et de leur utilisation chez les humains et les animaux au Canada
- Déterminer les politiques et les mesures à adopter pour freiner l'apparition et la propagation des bactéries résistantes chez les animaux, dans les aliments et chez les humains au Canada
Collaboration avec les vétérinaires, les producteurs d'aliments pour animaux et les agriculteurs
La promotion de l'utilisation responsable des antimicrobiens repose sur la collaboration avec les vétérinaires, les producteurs d'aliments pour animaux et les agriculteurs pour :
- élaborer des programmes de salubrité des aliments à la ferme et des conseils sur l'utilisation responsable des antimicrobiens
- financer la recherche visant à trouver d'autres façons d'améliorer la santé des animaux tout en réduisant le recours aux antimicrobiens
- modifier la loi pour exiger que l'utilisation des antimicrobiens soit supervisée par des vétérinaires
- améliorer la surveillance de l'utilisation des antimicrobiens
- soutenir les programmes visant à améliorer la santé des animaux d'élevage et favoriser les pratiques d'hygiène des animaux et d'élevage du bétail qui réduisent le recours aux antimicrobiens
- surveiller l'utilisation des antimicrobiens autorisés dans les fermes d'élevage
- informer les agriculteurs et les communautés agricoles sur l'utilisation responsable des antimicrobiens

Description de l'image – Comment la résistance aux antibiotiques peut-elle se propager?
Les animaux d'élevage reçoivent des antibiotiques, ce qui contribue au développement de bactéries résistantes aux antibiotiques.
Des engrais ou de l'eau contaminés par des bactéries résistantes sont utilisés sur des cultures destinées à l'alimentation.
Comment la résistance aux antibiotiques peut-elle se propager?
Les produits de viande qui ne sont pas manipulés ou cuits comme il se doit peuvent transmettre des bactéries résistantes aux antibiotiques aux humains.
Les cultures contaminées peuvent transmettre aux humains des bactéries résistantes.
- Date de modification :