Présence de fumonisines dans les aliments à base de grains, les produits de soja et les thés – 1er avril 2012 au 31 mars 2018

Chimie alimentaire

Résumé

Les études ciblées fournissent des renseignements sur les dangers alimentaires potentiels et contribuent à améliorer les programmes de surveillance régulière de l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA). Ces études permettent de recueillir des données sur la sécurité de l'approvisionnement alimentaire, de cerner les nouveaux risques éventuels ainsi que de fournir de nouveaux renseignements et de nouvelles données sur les catégories alimentaires, là où ils pourraient être limités ou inexistants. L'ACIA se sert souvent des études ciblées pour orienter ses activités de surveillance vers les domaines où le risque est le plus élevé. Les études peuvent aussi aider à identifier de nouvelles tendances et fournissent des renseignements sur la façon dont l'industrie se conforme à la réglementation canadienne.

Le Fusarium moniliforme et le Fusarium proliferatum sont 2 agents phytopathogènes qui sont répandus dans les régions céréalières partout dans le monde. Ces agents pathogènes peuvent infecter les cultures céréalières dans le champ (prérécolte) ou durant l'entreposage (post-récolte). Les agents pathogènes prolifèrent si les grains sont cultivés dans des conditions chaudes et sèches suivies de conditions très humides ou d'un entreposage sous des conditions humides. Les agents phytopathogènes produisent des mycotoxines appelées fumonisines. Ces toxines sont principalement associées à la production de maïs; dans les pays où le maïs est un aliment de base, des effets négatifs sur la santé ont été observés, y compris le cancer de l'œsophage en Afrique du Sud et en Chine^{Note de bas de page 1},^{Note de bas de page 2}, et des malformations du tube neural en Amérique centrale et dans le sud-ouest des États-Unis^{Note de bas de page 3}.

Les aliments à base de grains, les produits de soja et les thés sont également susceptibles d'être contaminés par les fumonisines, plus particulièrement la fumonisine B1 (FB1) et la fumonisine B2 (FB2). Ces produits sont consommés à divers degrés par une partie ou la totalité de la population canadienne.

En tenant compte des facteurs mentionnés ci-dessus et de leur pertinence pour les Canadiens, des aliments à base de grains (y compris mais sans s'y limiter de la farine, des flocons, de la semoule, des grains, des craquelins et des pâtes alimentaires), des produits de soja et des thés ont été choisis dans le cadre de cette étude ciblée sur plusieurs années. Les études ciblées visent à recueillir des renseignements de base relatifs à la présence et aux concentrations dans les aliments de composés chimiques présentant un risque.

Au cours de ces études de 2012 à 2017, un total de 4 261 échantillons ont été prélevés et analysés aux fins de détection de FB1 et FB2. Une ou les 2 formes ont été détectées dans 1 076 échantillons (25 %) analysés. Il n'y a actuellement aucune limite canadienne établie pour la présence de fumonisines dans les aliments, et tous les résultats associés à ces produits ont été évalués par le Bureau d'innocuité des produits chimiques de Santé Canada, afin qu'il détermine si les concentrations observées sont nocives pour les consommateurs. Les concentrations détectées dans les échantillons inclus dans ces études ne présentaient pas de risque pour la santé des consommateurs canadiens, et cette étude n'a mené à aucun rappel de produits.

L'ACIA continuera de surveiller les concentrations de fumonisines dans le cadre des études sur la présence de plusieurs mycotoxines dans divers aliments afin d'assurer la salubrité de l'approvisionnement alimentaire canadien.

En quoi consistent les études ciblées

L'ACIA utilise des études ciblées pour concentrer ses activités de surveillance dans les domaines où le risque est le plus élevé. Grâce aux données obtenues de ces études, l'Agence peut établir des priorités parmi ses activités afin de cibler les produits alimentaires les plus préoccupants. À l'origine, les études ciblées étaient menées dans le cadre du Plan d'action pour assurer la sécurité des produits alimentaires (PAASPA), mais depuis 2013 elles sont intégrées aux activités de surveillance régulières de l'ACIA. Les études ciblées constituent un outil précieux pour obtenir de l'information sur certains dangers posés par les aliments, cerner ou caractériser les dangers nouveaux ou émergents, recueillir l'information nécessaire à l'analyse des tendances, susciter ou peaufiner les évaluations des risques pour la santé, mettre en évidence d'éventuels problèmes de contamination ainsi qu'évaluer et promouvoir la conformité avec les règlements canadiens.

La salubrité des aliments est une responsabilité commune. L'ACIA collabore avec les paliers d'administration fédérale, provinciale, territoriale et municipale et exerce une surveillance de la conformité aux règlements visant l'industrie alimentaire pour favoriser une manipulation sûre des aliments à l'échelle de la chaîne de production alimentaire. L'industrie alimentaire et le secteur de la vente au détail au Canada sont responsables des aliments qu'ils produisent et vendent, tandis que les consommateurs sont individuellement responsables de la manipulation sécuritaire des aliments qu'ils ont en leur possession.

Pourquoi avons-nous mené cette étude

Fusarium moniliforme et Fusarium prolimatum sont 2 types de champignons (aussi appelés moisissures) qui peuvent contaminer les grains et d'autres cultures dans le champ (prérécolte) ou durant l'entreposage (post-récolte). Ces champignons prolifèrent si les cultures sont cultivées par temps chaud et sec, suivi de conditions très humides. La croissance des moisissures est également favorisée par l'entreposage dans des conditions humides. Ces moisissures peuvent contaminer les aliments à base de grains, les produits de soja et les thés. Ces produits alimentaires sont consommés à différents degrés par une portion ou la totalité de la population canadienne.

Les moisissures libèrent des mycotoxines, plus précisément des fumonisines. Le maïs est le grain le plus vulnérable à la contamination^{Note de bas de page 4}. Les concentrations de fumonisines peuvent être élevées, même en l'absence de signes visibles de prolifération des moisissures^{Note de bas de page 1}. Il y a plusieurs formes de fumonisines : les fumonisines B1 (FB1) et la fumonisine B2 (FB2) sont les plus courantes. Les études ont mis l'accent sur la FB1, mais les données disponibles suggèrent que FB2 a un profil toxicologique similaire^{Note de bas de page 3},^{Note de bas de page 5},^{Note de bas de page 6},^{Note de bas de page 7}. Ces contaminants sont stables à la chaleur jusqu'à 150°C et ne sont pas affectés par les forces mécaniques (comme le meulage); cependant, ils peuvent être réduits par un traitement alcalin^{Note de bas de page 8}.

Bien que la contamination par les fumonisines soit principalement observée dans le maïs, certaines études scientifiques ont montré que le vin rouge^{Note de bas de page 9}, le sorgho^{Note de bas de page 5}, le haricot blanc, le blé^{Note de bas de page 5}, l'orge^{Note de bas de page 5}, le soja^{Note de bas de page 5}, les figues^{Note de bas de page 5}, le riz^{Note de bas de page 10}, le thé noir^{Note de bas de page 5}, et les herbes médicinales^{Note de bas de page 5} peuvent également être affectés.

L'ingestion d'aliments contenant des fumonisines peut être dangereuse pour la santé humaine. Des effets sur la santé ont été observés dans des populations précises où le maïs est un élément important de l'alimentation et où le climat peut favoriser la prolifération des moisissures. Ces effets comprennent le cancer de l'œsophage (Afrique du Sud et Chine)^{Note de bas de page 1},^{Note de bas de page 2} et les malformations du tube neural (Amérique centrale et sud-ouest des États-Unis)^{Note de bas de page 3}. Les effets biologiques précis des fumonisines sont complexes et sont liés à l'interférence avec le métabolisme cellulaire4. Des études sur des animaux de laboratoire ont révélé que les fumonisines causaient des dommages au foie et aux reins chez de nombreuses espèces^{Note de bas de page 11}. La FB1 a été classée par le CIRC comme possiblement cancérogène pour les humains d'après des éléments de preuve issus d'études sur des animaux de laboratoire^{Note de bas de page 2}. Cette étude visait FB1 et FB2.

Les principaux objectifs de la présente étude ciblée étaient non seulement de produire des données de surveillance de base additionnelles sur les concentrations de fumonisines dans certains aliments ne faisant pas l'objet d'une surveillance systématique dans le cadre d'autres programmes de l'ACIA, dans le but d'évaluer la conformité avec les règlements canadiens proposés, mais aussi de comparer la prévalence des FB dans les aliments visés par la présente étude à ceux visés par les études ciblées précédentes.

Quels produits avons-nous échantillonnés

Entre le 1er avril 2012 et le 31 mars 2018, divers produits à base de grains, grains moulus, produits de soja et thés du Canada et de l'étranger ont été échantillonnés. Les échantillons de produits ont été prélevés dans des points de vente au détail de 6 grandes villes du Canada. Ces villes englobent 4 régions géographiques canadiennes :

• l'Atlantique (Halifax),
• le Québec (Montréal),
• l'Ontario (Toronto et Ottawa)
• l'Ouest (Vancouver et Calgary).

Le nombre d'échantillons recueillis dans ces villes était proportionnel à la population relative des régions respectives. La durée de conservation, les conditions d'entreposage et le coût des aliments sur le marché libre n'ont pas été pris en compte dans cette enquête. Les échantillons provenaient d'au moins 40 pays.

Analyse et évaluation des échantillons

Les échantillons ont été analysés par un laboratoire d'analyse des aliments certifié ISO/CEI 17025 sous contrat avec le gouvernement du Canada. Les échantillons ont été analysés « tels que vendus », sans égard à la façon dont ils auraient été consommés. Dans le présent rapport, le niveau FB fait référence à la somme des niveaux de FB1 et de FB2.

Il n'y a aucune limite canadienne établie pour la présence des fumonisines dans les aliments. En l'absence de limites de tolérance ou de normes applicables, Santé Canada peut effectuer des évaluations ponctuelles afin de vérifier la présence de concentrations élevées de mycotoxines en se fondant sur les données scientifiques les plus récentes, au cas par cas.

Résultats de l'étude

Parmi les 4 261 échantillons analysés, 75 % n'étaient pas contaminés par les fumonisines. Les niveaux de contamination des échantillons dans lesquels des fumonisines ont été détectées (25 %) sont indiqués au tableau 2. Les concentrations moyennes les plus élevées ont été constatées dans les aliments à base de grains, et les plus basses ont été constatées dans les produits de soja.

Seize grains différents sont associés aux aliments à base de grains; 5 des grains n'ont pas été associés à des concentrations de fumonisines détectables (marante, kamut, seigle, triticale et grains mélangés). Les taux de détection des 11 types de grains restants varient de 0,7 % (millet, quinoa) à 61 % (maïs). Voir le tableau 3 ci-dessous pour une analyse plus détaillée des taux de détection et des concentrations de fumonisines par type de grain.

Les 185 produits de soja testés comprenaient 26 échantillons de tofu, 24 échantillons de soja, 16 échantillons de préparations pour nourrissons à base de soja, 13 échantillons de farines de soja, 9 échantillons de substituts de viande, 9 échantillons de boissons de soja, 4 échantillons de tempeh, 3 échantillons de céréales pour nourrissons à base de soja, 3 échantillons de pâte de soja, 2 échantillons de miso, 1 échantillon de protéines de soja, et 1 échantillon de noix de soja. Seuls 2 échantillons de tofu contenaient des concentrations détectables de fumonisines.

Les échantillons de thé comprenaient 377 échantillons de thés séchés et 49 échantillons de boissons prêtes à boire. Les thés séchés comprenaient 101 thés verts, 100 thés noirs, 100 tisanes, 26 autres thés (contenant du riz ou d'autres grains), 25 thés oolong et 25 thés blancs. Un seul échantillon de thé noir contenait des concentrations détectables de fumonisines (43 ppb).

Sur les 4 261 échantillons analysés, 2 939 étaient issus de la culture conventionnelle et 1 322 portaient la mention « biologique ». Le taux de détection était de 28 % pour les produits issus de la culture conventionnelle, et de 18 % pour les produits biologiques. Dans le cas des produits issus de la culture conventionnelle, les concentrations allaient de 20 ppb à 7 710 ppb, avec une concentration moyenne de 382 ppb. Pour les produits biologiques, les niveaux variaient de 21 ppb à 7 790 ppb, avec une concentration moyenne de 303 ppb. Une ventilation détaillée des résultats est présentée à l'annexe A, tableaux A-1A-2 et A-3. Comme il a été mentionné précédemment, les fumonisines sont présentes naturellement et peuvent être détectées dans des produits issus de la culture conventionnelle et dans des produits biologiques. Les échantillons ont été prélevés dans des commerces de détail, et aucun renseignement n'était disponible sur les conditions présentes dans le champ et/ou lors de l'entreposage des produits bruts, ou sur les éventuels traitements fongicides (pouvant réduire la formation de moisissure et la production de mycotoxines) appliqués sur les produits.

Les résultats pour l'ensemble des données ont été communiqués à Santé Canada à des fins d'évaluation de salubrité. Santé Canada estime que les concentrations de fumonisines observées dans les produits analysés lors de cette étude étaient peu susceptibles de présenter un risque pour la santé. Aucun rappel de produit n'était justifié, compte tenu de l'absence de risque pour la santé humaine.

Que signifient les résultats de l'étude

Dans le cadre de la présente étude, 75 % des échantillons des aliments sélectionnés analysés étaient exempts de concentrations mesurables de fumonisines. Les tableaux 4 à 16 montrent les concentrations maximales, minimales et moyennes de fumonisines présentes dans les types spécifiques de grains alimentaires ou d'aliments observés au cours de la présente étude; ces résultats sont comparables à ceux d'études ciblées précédentes^{Note de bas de page 12},^{Note de bas de page 13} et à ceux présentés dans des articles scientifiques^{Note de bas de page 14},^{Note de bas de page 15},^{Note de bas de page 16},^{Note de bas de page 17},^{Note de bas de page 18},^{Note de bas de page 19},^{Note de bas de page 20},^{Note de bas de page 21},^{Note de bas de page 22},^{Note de bas de page 23},^{Note de bas de page 24},^{Note de bas de page 25}.

* Pour voir une ventilation détaillée des produits à base de maïs, consulter l'annexe B.

Annexe A

Annexe B